Le blog de Mgr Claude DAGENS

Les élections, l'Église catholique et le monde rural. Éditorial d' "Église d'Angoulême" du 3 juin 2012

1 Juin 2012 Publié dans #Edito Église d'Angoulême

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          « Le cri des campagnes » : le 23 avril dernier, un quotidien local évoquait ainsi les résultats du premier tour des élections présidentielles. Il commentait des chiffres qu’il s’agissait d’interpréter.

            J’ai été heureux de pouvoir, à deux reprises, avec les équipes animatrices des doyennés de La Bonnieure et du Confolentais, puis de Montbron – La Rochefoucauld, faire ce travail d’interprétation politique. Car la politique fait partie de la vie commune. Elle n’est pas tabou. Et s’il s’agit de cris, et en particulier de cris de colère ou de souffrance, il faut écouter les personnes qui lancent ces cris.

            Dire et penser cela, c’est s’engager dans une réflexion raisonnable, avec tout ce qu’exige une telle réflexion, et tout particulièrement :

            - un effort de compréhension et d’analyse

            - une prise de conscience de nos responsabilités de catholiques à l’intérieur de notre société, et spécialement du monde rural.

 

 

1. Un effort de compréhension et d’analyse

 

            Ce vote « des campagnes », c’est-à-dire de nombreuses communes rurales en faveur du Front national, est révélateur des évolutions de notre société, et notamment de deux phénomènes majeurs.

            D’abord l’aggravation de la pauvreté, qui provoque le surendettement pour beaucoup de personnes affrontées au chômage et à de nombreux autres handicaps sociaux. Et souvent, ces pauvretés sont muettes : les personnes endettées ne crient pas leur misère, elles sont humiliées et souffrent silencieusement.

            Ensuite, l’isolement humain qu’entraîne avec elle la pauvreté, et cela vaut pour plusieurs catégories de personnes qu’une enquête du Secours catholique avait signalées en 2009 : des mères célibataires et des gens âgés. Les unes et les autres ont tendance à s’enfermer et leur enfermement empêche que l’on se rende compte de leur situation réelle.

            Face à ces situations, la pratique de la fraternité chrétienne a une réelle importance. Elle ne recouvre pas l’appartenance à un club. Elle implique un effort de conversion : le Bon Samaritain est celui qui non seulement voit l’homme abandonné au bord du chemin, mais va immédiatement le secourir. Le prochain n’est pas celui que l’on choisit, c’est celui que l’on rencontre et qui appelle au secours.

 

 

2. Une prise de conscience de nos responsabilités de catholiques

 

            Les élections passent, les situations de détresse demeurent. L’Église catholique doit répondre à l’appel du Christ quand il nous demande d’ouvrir nos yeux aux « signes des temps », notamment dans ce monde rural, qui est globalement méconnu, mais qui est le reflet de toutes les métamorphoses de notre société.

            Dans ce monde rural, beaucoup d’élus locaux, de membres des municipalités, de responsables d’associations, puisent dans leur mémoire catholique et souvent dans leur foi chrétienne la force de s’engager et de servir. L’Église catholique est réellement présente dans ce monde, non pas comme un groupe de pression, mais comme une force de proposition, en donnant la priorité aux personnes, à commencer par les plus fragiles. Cette présence de l’Église passe par des engagements réels, par des prises de conscience politique, mais aussi par la simple ouverture au Dieu vivant, par la prière, par le travail permanent d’initiation chrétienne, par des activités d’accueil et d’accompagnement.

            Elle est là, notre Église, modeste et vivante, « sacrement du Christ », « signe et instrument de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium, 1).

 

X Claude DAGENS, évêque d’Angoulême

Le 28 Mai 2012

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