Le blog de Mgr Claude DAGENS

LE CIEL DE DIEU ET LA TERRE DES HOMMES : UN GRAND BESOIN D'EAU ET DE SOLIDARITE. Homélie prononcée à Charmant, le 2 juin 2011

9 Juin 2011 Publié dans #Homélies

 

            « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » dit Jésus Ressuscité au moment où il quitte définitivement ses disciples pour entrer dans le ciel de Dieu.

            Cette Ascension de Jésus Christ est réellement un départ, mais c’est aussi un engagement. Et les deux sont inséparables. Celui qui monte vers le ciel de Dieu et qui disparait, c’est cet homme nommé Jésus qui s’est révélé comme le Fils du Dieu vivant, et qui a tout pris sur lui de notre condition humaine. Et si maintenant, il se sépare de nous, il emporte avec lui, dans la lumière de Dieu, tout le mystère qui l’habite. Avec lui, le Ressuscité, nous sommes appelés à entrer dans le Royaume de Dieu : il passe de ce monde à son Père et il nous entraine avec Lui, pour toujours, si nous le suivons. Regardez la façade de notre cathédrale Saint-Pierre d’Angoulême : vous verrez le Christ de l’Ascension au sommet, dans les hauteurs, mais vous verrez aussi qu’il regarde vers nous, qu’il reste lié à nous et qu’il nous attire avec Lui vers le Père. Le chemin est ouvert et Il est lui-même le chemin et la porte du paradis de Dieu.

            Mais, au même moment, il s’engage : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » Et, plus que cela, dans le récit des Actes des apôtres, il se relie à nous en promettant la venue et le don de l’Esprit Saint qui, Lui, ne nous emporte pas vers le ciel, mais vient nous saisir du dedans et nous expose au monde, nous envoie dans le monde réel pour que nous y devenions des signes du Christ, des témoins de sa Pâque, de sa victoire sur le mal et la mort. « Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre. »

            Et jusqu’en Charente : oui, ici, chez nous, sur cette terre sèche où l’on attend la pluie et où des agriculteurs s’inquiètent pour leur avenir, à cause de la dégradation de leurs conditions de vie.

            Je l’ai promis et je tiendrai ma promesse : tout en regardant vers le Christ de gloire, je pense aux souffrances de ces hommes et de ces femmes de chez nous qui ont du mal à espérer. En leur nom, je lance un cri d’alarme. Nous avons besoin d’eau, mais aussi de solidarité. Et nous prions pour qu’il pleuve, mais aussi pour que rien n’empêche les actes de solidarité mutuelle, pour que la foi chrétienne inspire partout, dans nos communautés, des gestes d’attention, d’entraide, de collaboration et aussi des initiatives communes pour faire face à cette situation de crise grave.

            Nous ne pouvons pas nous résigner, ni à l’aggravation de la pauvreté, et souvent de la pauvreté muette, qui ne crie pas, parce que « l’on a sa dignité », ni à l’élargissement des fossés qui séparent ceux qui ont les moyens de vivre et de se développer et ceux qui ne les ont pas.

            Et que l’on ne dise pas que le monde rural, et spécialement le monde agricole, serait un monde en voie de disparition, et qu’il faudrait consentir à cette agonie plus ou moins douloureuse.

            L’espérance que nous mettons dans le Christ vivant et que nous pratiquons en célébrant l’Eucharistie nous interdit cette résignation. D’autant plus que les inquiétudes du monde rural sont celles de toute notre société, où l’on ne peut pas accepter des processus de déshumanisation rampante et où l’on doit rechercher ce qui permet de maîtriser des évolutions économiques de grande ampleur, qui exigent des mesures politiques de régulation nationale et internationale.

            Si nous entendons l’appel de Jésus : « Vous serez mes témoins », nous ne pouvons pas ne pas y répondre, en demandant la pluie, par une prière insistante, et en acceptant d’ouvrir nos cœurs et nos consciences aux besoins les plus urgents qui se manifestent parmi nous.

            Je vous demande à tous d’être vraiment chrétiens dans notre société actuelle, en pratiquant l’ouverture à Dieu, en priant, en regardant vers le Christ qui demeure au milieu de nous, dans le sacrement de sa Pâque, mais aussi en pratiquant l’attention aux autres, à ceux et celles qui sont tentés par la résignation ou la désespérance, et parfois par le suicide.

            Nous sommes le Corps du Christ. C’est à travers ce Corps que la force de la résurrection du Christ se manifeste. À nous de désirer et d’accueillir cette force. Elle ne résout  pas les difficultés économiques, mais elle permet d’y faire face autrement, avec la certitude que rien n’est jamais perdu, que la solidarité est toujours possible et que le Christ demeure avec nous chaque jour.

 

+ Claude DAGENS, évêque d'Angoulême

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